Editorial
Dimanche 20 avril 2025
Elles se rendirent au tombeau, portant les aromates
« Que nous représentent, s’interroge saint Bernard, ces trois saintes femmes qui s’en vont acheter des parfums après la mort de Jésus, pour embaumer son corps, déposé dans le tombeau ? Quel exemple nous donnent-elles à suivre dans leur action ?
Selon saint Grégoire tout ce qui s’est fait est un signe de ce qu’il faut faire dans la sainte Eglise. Pour nous donc, si nous voyons que le Christ, c’est-à-dire la foi du Christ, a cessé de vivre dans le cœur de quelqu’un de nos frères, il faut employer tous nos soins pour venir embaumer son corps et nous approcher de lui, après avoir fait emplette de parfums.
Les trois saintes femmes de l’Évangile nous représentent trois puissances qui se procurent chacune les parfums qui leur conviennent. Quelles sont-elles ? Ce sont l’esprit, la main et la langue. En effet, quiconque achète, donne quelque chose et reçoit une autre chose ; et ce qu’il donne, il le perd pour acquérir ce qu’il reçoit.
L’esprit donne l’écu de sa volonté propre, et il fait emplette de sentiments de compassion, de zèle pour la justice, et de discernement dans le conseil. La main paie en monnaie d’obéissance, et reçoit, en échange, la patience dans les tribulations, la persévérance dans l’action, et la continence dans la chair. Quant à la langue, elle donne le denier de la confession, et reçoit la mesure dans la correction, l’abondance dans l’exhortation, et l’efficacité dans la persuasion.
Après s’être approvisionnées de parfums, elles s’entretenaient entre elles le long du chemin et se disaient : « Qui nous ôtera la pierre qui ferme l’entrée du sépulcre ? Or, cette pierre, c’est la tristesse excessive, ou la paresse, ou la dureté. Car, tant qu’elles ferment l’entrée du cœur, il est inutile que l’esprit, la main et la langue s’approchent du mort avec leurs parfums pour l’embaumer.
Mais parce qu’il est écrit : « Tu entends, Seigneur, le désir des pauvres, tu rassures leur cœur, tu les écoutes. » (Ps 9,17), elles voient la pierre écartée et elles entrent dans le sépulcre, mais alors elles apprennent que le mort dont elles venaient embaumer le corps est ressuscité.
Qui le leur fait connaître ? Qui le leur annonce ? C’est un ange qui avait été témoin de cette résurrection. Aussi voit-on le visage de celui en qui le Christ est ressuscité, plus joyeux et son aspect plus beau ; son langage est plus pur, sa démarche plus modeste et son esprit plus prompt à toute espèce de bonnes œuvres.
Or, qu’est-ce que tout cela, sinon autant de gais messagers de sa résurrection intérieure ? On pourrait de même donner un sens figuré à tous les autres détails de la résurrection de Jésus-Christ, dans le linceul trouvé sur la pierre du sépulcre, dans l’annonce faite par l’ange que le Seigneur se fera voir en Galilée, et dans tous les autres traits du récit évangélique, en sorte que tout ce qu’on raconte comme s’étant passé dans le Christ, se trouve reproduit au sens moral dans son corps (l’Eglise). »
« Dieu, écrit saint Jean de la Croix, n’opère jamais des merveilles que lorsqu’elles sont nécessaires pour croire. Notre Seigneur montra premièrement à Marie-Madeleine le sépulcre vide (Mt 28,1-8) et ensuite il fit que les anges lui annoncent la Bonne Nouvelle – parce que la foi vient de ce que l’on entend » (Rm 10,17) – et que, le comprenant, elle le crût avant de le voir (cf. Lc 24,4-8). (Montée Carmel).
Saint Bernard, Sermon